Des ados d’aujourd’hui réagissent

 “Les étudiants face à eux-mêmes” : Revisiter la jeunesse d’hier pour entendre celle d’aujourd’hui

Par Leah Szopko, 2021.

Introduction

« Les jeunesses se suivent, mais se ressemblent-elles ? » (Bienvenue, p. 7). C’est avec cette question que Louise Bienvenue entame son ouvrage Quand la jeunesse entre en scène : L’Action catholique avant la Révolution tranquille, un questionnement dont je n’ai pas réussi à me détacher depuis ma lecture de ce livre.

À la suite du dépouillement de notre corpus, je me suis particulièrement intéressée à la revue Claire (1957-1964) et à ses rubriques intitulées « Les étudiants face à eux-mêmes » (1960-1961), soit de courtes entrevues où des jeunes, garçons et filles, s’expriment au sujet de débats ou répondent à des questions qui divisent la jeunesse du temps. L’intérêt que je porte à ces articles relève du fait qu’ils permettent de retracer concrètement les voix des jeunes, sources rares en histoire de l’enfance, en plus de mettre en lumière à la fois les convictions, les préoccupations, les questionnements et les intérêts de certain.e.s jeunes de l’époque. Ainsi, j’ai cherché à exploiter le questionnement de Louise Bienvenue en me demandant ce qui avait changé, ou non, entre la jeunesse (catholique) des années 1960 au Québec et celle d’aujourd’hui.

Sachant qu’« inclure la perspective des jeunes ou leur voix est une des pistes les plus abondamment explorées ces dernières années pour rendre justice à l’histoire complexe et nuancée de la jeunesse » (Cardinal-Lamarche et al., p. 36), je voulais que mon exercice réponde à la double mission de mettre au jour les voix des jeunes du passé et d’inclure les perspectives des jeunes d’aujourd’hui à l’histoire de la jeunesse. C’est dans cette optique que j’ai choisi de rencontrer deux classes de 5e secondaire, durant leur cours d’histoire du 20e siècle. Les étudiant.e.s avaient d’abord à lire et à annoter un des deux articles suivants :

À 14 ans, doit-il y avoir des sorties garçons-filles? Les étudiants face à leur langage habituel

Cet exercice était suivi d’une discussion en classe, faisant le pont entre la jeunesse d’hier et d’aujourd’hui, et d’un travail réflexif à remplir à la maison, me permettant d’évaluer la pertinence d’une activité d’analyse de sources pour mieux comprendre les réalités du passé.

***Aux enseignantes et enseignants qui souhaiteraient reproduire l’exercice dans leur classe, je mets à votre disposition un guide qui détaille la préparation de l’atelier. Vous trouverez également un document qui présente ma rétrospection sur chacune des questions posées, le travail réflexif post-rencontre demandé aux élèves (commenté pour une meilleure adaptation à votre contexte!), et les numérisations des autres articles que vous pourriez utiliser pour votre activité.

Discussions autour de la rubrique « Les étudiants face à eux-mêmes… »

À 14 ans doit-il y avoir des sorties garçons-filles ?

Les étudiant.e.s sondé.e.s étant curieux.ses de cerner ce que les jeunes pensaient des relations amoureuses à l’époque, cet article fut le plus populaire parmi les deux proposés. Considérées comme un sujet encore tabou par les uns, et dites matière à débat et sujet d’actualité par les autres, les relations amoureuses n’ont laissé personne indifférent.e !

Le titre de l’article stimula particulièrement la discussion. En précisant qu’il abordait les sorties entre garçons et filles, les élèves ont noté qu’il écartait d’emblée tout appui envers les relations homosexuelles ; c’était évidemment inacceptable à l’époque, puisque cela ne concordait pas avec les valeurs conservatrices de l’Église, tel que les étudiant.e.s l’ont soulevé. D’ailleurs, en rappelant fréquemment aux élèves l’importance de replacer l’article dans son contexte de création, ielles ont avancé que l’article partageait seulement « des opinions de jeunes qui fittaient avec ce que [la revue] voulait véhiculer », ce qui faisait en sorte que certain.e.s adolescent.e.s, déjà marginalisé.e.s de par leur orientation sexuelle, voyaient aussi leurs émotions invalidées. De plus, en tenant compte du fait que les articles étaient publiés par la Jeunesse étudiante catholique, une étudiante a eu le réflexe de demander « si [c’était] vraiment les jeunes qui parl[aient] dans les articles ou si [c’étaient] les adultes qui les [avaient] écrits ». Cette réflexion m’a paru particulièrement intéressante, car dans le cadre de notre séminaire, nous nous étions posé la même question lors de la lecture des courriers de lecteur.trice.s. Ainsi, les élèves se sont montré.e.s très critiques face aux propos tenus dans l’article, en soulignant qu’aujourd’hui, la société est beaucoup plus ouverte d’esprit, notamment depuis l’éclatement des normes genrées. Pourtant, lorsque nous avons discuté de la citation suivante : « Je crois qu’un garçon ne devrait pas sortir avec les filles s’il ne peut pas gagner ses propres dépenses », phrase qui sous-entendait, selon les élèves, que c’est au garçon de payer les sorties, les réactions furent mitigées. Alors que certaines ont souligné que les filles sont désormais indépendantes et « capables de se gérer elles-mêmes », d’autres ont affirmé qu’elles s’attendent encore à ce que le garçon paye pour une sortie, « même si c’est moins fréquent [qu’autrefois] ». Ainsi, malgré la volonté de se détacher de certaines normes sociétales, il reste que divers standards de galanterie genrés semblent encore très présents dans les mœurs de la jeunesse, alors qu’ils sont intériorisés chez plusieurs.

Les étudiants face à eux-mêmes… et à leur langage habituel !

Les élèves interpelé.e.s par cet article ont quant à elleux souligné que l’enjeu de la langue et du langage était toujours «d’actualité», d’où l’intérêt de se pencher sur la question. Les étudiant.e.s ont rapidement fait des parallèles intéressants avec aujourd’hui, alors que certain.e.s ont souligné que la critique du joual s’est déplacée vers une critique des anglicismes et du franglais, et que le « slang » de l’époque est synonyme du langage habituel d’aujourd’hui (ce qui témoigne de la continuité dans le changement !).

D’autres ont aussi mentionné que les enseignant.e.s du temps semblaient très rigoureux.ses et strict.e.s quant à l’utilisation d’un « bon » français, ce qui ne serait plus le cas aujourd’hui, principalement parce que « parler mal » n’a plus la même définition qu’autrefois. En effet, un étudiant a souligné qu’« aujourd’hui, on peut se permettre d’être plus relax [dans nos interactions] avec les professeur.e.s, […mais…] si je sacre, je vais recevoir un avertissement ou peut-être une conséquence ». J’ai alors demandé à l’enseignant du groupe s’il existait des sanctions pour l’utilisation d’un mauvais langage ; « oui, il y a des mémos [avertissements] me dit-on, mais ce n’est pas très utilisé ! ». Une réponse qui nous rappelle les critiques de Jean-Paul Desbiens dans son œuvre Les insolences du Frère Untel (1960), publié dans les mêmes années que notre corpus ; l’auteur y plaide pour un réexamen des méthodes d’enseignement, entre autres, considérées comme désuètes et inefficaces :

« Nos élèves parlent joual parce qu’ils pensent joual, et ils pensent joual parce qu’ils vivent joual, comme tout le monde par ici. Vivre joual, c’est Rock’ n’ Roll et hot-dog, party et balade en auto, etc. C’est toute notre civilisation qui est jouale. On ne réglera rien en agissant au niveau du langage lui-même (concours, campagnes de bon parler français, congrès, etc…) C’est au niveau de la civilisation qu’il faut agir. […] Seul l’État, gardien du bien commun, peut agir efficacement au niveau de la civilisation. » (Desbiens, p. 18-20)

 

Force est d’admettre qu’aujourd’hui, nous pourrions facilement remplacer « campagnes de bon parler français » par des « mémos au dossier »… Plus encore, les participant.e.s associaient l’utilisation d’un niveau de langage relativement soutenu, tel qu’employé par les étudiant.e.s interviewé.e.s dans les revues, à de la maturité et du sérieux, mais aussi à une attitude prétentieuse, ou encore « coincée », dont ielles se moquent quelque peu en classe!

Enfin, au terme de cette discussion, les élèves soutiennent que leur manière de parler fait partie de la culture du temps, comme le joual faisait partie de l’identité québécoise de l’époque. Ielles demeurent toutefois bien conscient.e.s des influences qui agissent sur leur langage, telles que la musique, les séries télévisées et les jeux vidéo en anglais. Les élèves ont souligné qu’ielles « n’écoutent plus Radio-Canada et Télé-Québec, [qui ont été remplacés par] Netflix », ce qui suggère notamment que les jeunes de l’époque n’écouteraient que ces postes. Pourtant, ceux et celles-ci écoutaient des postes anglophones en provenance, entre autres, de North Bay (Ontario) et de Buffalo (État de New York), d’autant plus que leur langage était influencé par des loisirs américains, tels que les films western et la musique des Beatles, d’Elvis !

La jeunesse d'aujourd'hui se fait entendre... où? quoi? comment?

J’ai choisi d’introduire cette section avec un récent article tiré d’un journal étudiant, où l’auteur révèle les résultats d’un sondage mené auprès d’élèves de 4e secondaire quant à leur avis sur le passage de l’agenda papier vers l’agenda numérique. Cet exemple me permettait ainsi de faire le pont entre les jeunesses d’hier et d’aujourd’hui, alors qu’il mettait en lumière un questionnement (que je considérais) propre à la génération des élèves interrogé.e.s. Nous avons toutefois peu élaboré sur ledit article, notamment parce que les élèves ont soulevé qu’ielles ne lisent et ne contribuent pas audit journal étudiant. En fait, non seulement l’ère numérique n’apparait pas particulièrement comme un enjeu, mais le périodique n’est clairement plus un moyen de communication primé ; de manière unanime, les élèves ont souligné que c’est désormais par le biais des réseaux sociaux que la plupart de leurs échanges se font, surtout via Instagram, Twitter et TikTok.

Si les jeunes utilisent les réseaux sociaux pour communiquer au quotidien, il s’agit aussi de milieux propices au partage d’opinions et à la collecte d’informations, notamment en lien avec les enjeux de société qui animent la jeunesse, tels que l’environnement, les causes LGBTQ+, la discrimination et le féminisme. Les élèves sont par ailleurs revenu.e.s sur la période des années 1950-1960, en soulignant que ce n’était pas des questions « importantes » pour l’époque, même « qu’on n’en parlait pas ». À titre d’exemple, lorsque nous avons abordé la question du racisme, une étudiante a mentionné que dans les années 1950-1960, « on savait que ça existait, mais aujourd’hui avec les meurtres [de personnes racisées] aux États-Unis par exemple, on a eu [accès à] des vidéos, donc en plus d’en entendre parler, on voyait les images donc c’était plus choquant ». Certes, les images circulent plus rapidement et frappent les esprits. Or, dans notre corpus aussi, la question du racisme est abordée de front, tel qu’en témoigne l’extrait ci-contre (François, 15 octobre 1956, p. 6).

Enfin, ce qu’on constate, c’est que la plupart des élèves, et plus largement des jeunes, militent pour du changement sur divers plans, et si les réseaux sociaux leur permettent de véhiculer leurs idées, ielles s’expriment également au sein de manifestations, moyen considéré comme « plus efficace pour se faire entendre ». Cela dit, ces actions engagées sont généralement associées au mouvement « woke », terme à connotation désormais péjorative, souvent employé par des adultes qui critiquent les (ré)actions des jeunes.

Question de perception : « les jeunes de nos jours… »

Lorsque j’ai demandé à la classe quelle(s) perception(s) les adultes ont-ielles des jeunes d’aujourd’hui, la grande majorité des élèves ont soulevé un ensemble de stéréotypes négatifs qu’ielles se disent habitué.e.s d’entendre pour décrire les jeunes :

Nous sommes « toujours sur [nos] écrans [ou nos] téléphones », nous sommes » paresseux », « lâches », « chialeux » et « toujours dans notre chambre ». Les jeunes sont aussi ceux pour qui « la vie est plus facile », car « ils ont tout cuit dans le bec », à quoi s’ajoute le fait qu’ielles « ne veulent pas travailler » et ne se « préoccupent que des choses inutiles ». Au final, « il s’agit simplement de dire les jeunes de nos jours sont… et [d’insérer] un élément négatif ».

Face à ces propos, j’ai par la suite demandé aux élèves s’ielles considéraient qu’il s’agissait de la réalité. D’entrée de jeu, il est à noter que les élèves ont précisé, à juste titre, qu’on ne peut pas parler des « jeunes » comme d’une masse homogène (un bémol qu’ielles ne font toutefois pas lorsque l’on parle de la catégorie des « adultes » !). Puis, les participant.e.s m’ont offert des réponses beaucoup plus nuancées que ce à quoi je m’attendais.

Parmi celles et ceux qui approuvaient les stéréotypes négatifs, la plupart ont affirmé que certain.e.s jeunes font, en effet, moins d’efforts ou sont moins productif.ve.s que d’autres au quotidien. De plus, le fait que les écrans occupent une place considérable dans leur vie est revenu fréquemment dans les réponses obtenues. En effet, étant donné que le numérique est non seulement source de divertissement, mais qu’il facilite aussi les communications, les jeunes sont presque constamment en contact avec des écrans ; il devient alors difficile de nier cette critique de la part des adultes.

D’autres ont tout de même cherché à nuancer les stéréotypes énoncés plus haut, à la fois en faveur des jeunes et des adultes. Certain.e.s considèrent notamment que les adultes, et la société en général, mettent moins de pression sur les épaules des étudiant.e.s par rapport à leur scolarité, notamment parce que les parcours « linéaires » ne sont plus la norme. Selon les participant.e.s, il est désormais possible de prendre une pause d’études, sans jugement, notamment pour préserver leur santé mentale, une interruption qui amène parfois les jeunes à modifier leur cheminement académique. Ces propos viennent appuyer ce que les études montrent : en effet, il y a, au niveau collégial entre autres, une « diversification des voies de sorties, [ainsi qu’un] allongement des études, qui se traduit par une légère augmentation de la diplomation deux ans après la durée prévue des programmes de DEC »(Blackburn, Gaudreault et Gaudreault). Un étudiant a ajouté à cela qu’« une grande part des jeunes concilient le travail et les études », ce qui, d’une part, nuance le fait que tou.te.s sont « paresseux.ses » et, d’autre part, témoigne du sens des responsabilités chez plusieurs jeunes.

La jeunesse et les transformations sociétales

En histoire de l’enfance (et de la jeunesse), il existe des nuances entre ce que l’on identifie comme les voix des jeunes, soit « [leurs] opinions, [leurs] émotions et [leurs] comportements » et l’agentivité, qui renvoie « à leurs choix individuels et à leurs (ré)actions face à ce que la société attend d’eux » (Cardinal-Lamarche et al., p. 37). Sans aborder les débats qui subsistent chez les historien.ne.s par rapport à ces termes, j’ai tenté d’effleurer la question en demandant aux élèves si, selon elles et eux, les actions, les choix et les voix des jeunes jouent un rôle dans la transformation de la société.

Malgré le faible taux de participation pour cette question (28 %), les étudiant.e.s répondirent oui à l’unanimité, et ce, pour différentes raisons. La majeure partie des répondant.e.s se considérant comme les adultes de demain, il devient alors, à leur sens, impératif de militer pour un avenir meilleur. Au lieu de se sentir impuissant.e.s dans une société où les gouvernements et les grandes entreprises ont la mainmise sur pratiquement toutes les sphères de la société, les jeunes sentent que leurs actions peuvent avoir des impacts notables et s’assurent ainsi de trouver des moyens se faire entendre. Ielles s’organisent, se regroupent et manifestent, des mobilisations qui semblent porter fruit, alors que plusieurs mentionnent qu’ielles se sentent écoutées. « En donnant leurs idées et leurs opinions, me dit une étudiante, les jeunes peuvent grandement améliorer certaines situations » ; plus encore, « ce sont toujours les jeunes qui apportent le changement » ajoute un autre élève.

Ceci étant dit, au terme de l’exercice, j’ai réalisé que la question avait probablement été mal introduite (quelle est la différence entre voix et agentivité), mal décortiquée (pourquoi peut-on dire que les actions, les choix et les voix des jeunes jouent un rôle dans la transformation de la société ? comment cela se manifeste-t-il ?) et ainsi, mal comprise. La complexité sous-jacente de la question y est aussi pour beaucoup, à mon avis. Je vous invite ainsi à consulter le document « Rétrospection sur les questions posées » (voir lien plus haut), où j’étaye davantage mes commentaires rétrospectifs par rapport à cette question, ce qui vous permettra de corriger le tir lors de votre propre atelier.

La jeunesse, une construction... par qui?

Pour conclure l’activité, j’ai cherché à pousser la réflexion des élèves encore un peu plus loin. J’ai présenté le concept de « jeunesse » comme étant construit, en opposition aux « jeunes », qui sont des acteur.trice.s historiques. Je leur ai ainsi posé une question qui anime encore aujourd’hui les historien.ne.s de la jeunesse : selon vous, est-ce la société ou les jeunes qui définissent la jeunesse ? Les réponses furent, ici aussi, très nuancées et fort intéressantes ; je laisse également quelques pistes de réflexion à explorer davantage si vous reproduisez l’exercice.

Pour certain.e.s, il semble clair que c’est la société qui construit la « jeunesse », notamment parce que si l’on demandait exclusivement aux jeunes de la définir, iels « ne donneraient que les bons éléments de la jeunesse, pas les mauvais». Si c’est une probabilité, cela m’amène tout de même à me demander si en énonçant ces éléments, positifs comme négatifs, les jeunes ne sont pas en train de définir ce qu’iels entendent par «jeunesse». De plus, la définition de cette catégorie est-elle nécessairement plus objective si elle provient des adultes (en gardant à l’esprit ce qui a été mentionné plus tôt)?

Dans un autre ordre d’idées, un participant a mentionné que puisque  les moeurs et valeurs d’une société fluctuent, c’est la société qui définit la « jeunesse », car « [la société] décide quand est-ce que la jeunesse commence. [En fait] elle commence quand tu nais, mais [la société décide] plutôt quand [la jeunesse] finit ». Cette position est très intéressante, notamment parce qu’elle laisse entendre que la jeunesse est avant tout une catégorie d’âge, une interprétation qui divise, encore à ce jour, les historien.ne.s de l’enfance et de la jeunesse.

Enfin, d’autres étudiant.e.s ont offert des réponses nuançant l’argumentaire. Certain.e.s ont notamment affirmé que ce sont plutôt les jeunes qui construisent la « jeunesse », car même si la société propose une définition de cette catégorie, il revient aux jeunes de l’accepter ou de la rejeter. Dès lors, les jeunes agissent et font des choix par rapport à cette définition, faisant d’eux et d’elles les architectes principaux de cette catégorie. Quelques participant.e.s ont également poussé la réflexion plus loin, en suggérant que puisque les jeunes sont en constante construction de leur identité — « on se cherche » et « on change » — ielles sont donc les seul.e.s à avoir un impact direct sur la définition de ce qu’est réellement la jeunesse, dans toutes ses nuances.

Conclusion

En guise de conclusion, j’aimerais revenir sur le fil conducteur sous-jacent de cet atelier, à savoir la pertinence d’étudier lhistoire de la jeunesse pour comprendre, plus largement, lhistoire dune époque. Vous connaissez certainement mon opinion sur le sujet, ce pourquoi je cède ici la parole aux participant.e.s, qui ont tou.te.s répondu, sans exception, qu’il s’agit d’un champ de l’histoire à exploiter. Étudier ce champ, me disent-ielles, c’est saisir l’influence des jeunes sur le cours de l’histoire, ceux et celles-ci étant les « catalyseurs des changements ». Se pencher sur les mentalités des jeunes d’une époque pour en saisir les transformations à travers le temps, c’est ce qui nous permet de comprendre un peu mieux les adultes d’aujourd’hui. C’est aussi jeter un regard nouveau sur les « tournants » de notre histoire, le point de vue des jeunes étant généralement écarté de l’étude du passé.

Étudier l’histoire de l’enfance, c’est aussi revisiter le récit historique traditionnel véhiculé par les manuels et les programmes ministériels. En laissant de côté l’histoire des grands personnages et des grands événements le temps d’un moment, les élèves ont la chance de contribuer directement à une historiographie en plein essor, en plus de se sentir interpelé.e.s dans cette discussion entre jeunes au sujet des jeunes ; des parallèles se tissent, des réflexions se partagent et l’étude du passé prend un sens nouveau, pertinent, et important qui aide à comprendre le présent. Ainsi, à la lumière des témoignages recueillis et au terme de cet atelier, j’ose espérer vous avoir convaincu.e des richesses et des possibilités qu’offre l’histoire de la jeunesse, et je vous invite par le fait même à tenter l’expérience que je vous ai présentée ; vous serez ravi.e des résultats, j’en suis certaine.